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La culture compte-t-elle vraiment dans le sport?

Au cours des dernières années, le mot culture est devenu un mot à la mode dans le sport canadien. Les gros titres sur la « culture toxique de Hockey Canada », la « crise culturelle à Gymnastique Canada » et la « culture de l’abus et de la discrimination » dans plusieurs organismes nationaux de sport (ONS) ont mis la question sur le devant de la scène.  L’athlétisme, le soccer, le patinage, l’aviron, le bobsleigh et le skeleton, la natation artistique, le rugby, la, le ski et le water-polo figurent parmi les sports où le personnel et les athlètes ont fait part de leurs préoccupations.  Même le Bureau du commissaire à l’intégrité du sport, l’organisme chargé de traiter les allégations d’abus au Canada, a fait l’objet d’un examen minutieux 

Les fractures culturelles semblent en effet être au cœur des défis sportifs du Canada. Cependant, l’idée de culture dans le sport est complexe, et le changement culturel peut souvent paraître insaisissable. 

L’un des principaux problèmes liés à la culture est qu’elle est souvent confondue avec le climat. La culture façonne les valeurs, les croyances et les pratiques générales au sein d’une organisation, tandis que le climat fait référence à l’atmosphère ou à l’environnement qui découle de ces facteurs culturels sous-jacents. La métaphore de l’iceberg est souvent utilisée pour illustrer la culture et clarifier la distinction entre culture et climat : 

Le climat est le produit de la culture. Dans cette métaphore, le climat est influencé par l’interaction de l’iceberg avec son environnement. 

  • La glace de surface représente les artefacts et les pratiques culturelles visibles. 
  • La glace immergée symbolise les valeurs et les croyances qui guident et soutiennent les comportements et les structures. 
  • L’eau, quant à elle, correspond aux hypothèses ou principes directeurs qui façonnent ces valeurs et croyances. 

Un véritable changement culturel ne se produit que lorsque nous plongeons dans ces principes sous-jacents pour révéler, comprendre, puis transformer les principes directeurs qui influencent tout ce qui en découle. 

La culture est un élément essentiel qui peut être modifié par une attention, une intention et des efforts soutenus. 

L’équilibre du changement culturel dans le sport 

Les recherches menées par Macintosh et Doherty (2023) décrivent un défi associé au changement culturel comme étant un défi d’équilibre : « foncer » est une bonne chose, mais il peut y avoir « trop d’une bonne chose ». Gagner avant tout entraîne des coûts, par exemple pour la santé, l’éthique, le développement et la sécurité. À nous le podium a créé un programme de « culture de l’excellence » basé sur le modèle Blake-Mouton (1964) pour équilibrer les personnes et les performances.  Walinga, Van Tuyl et Mandap (2024) montrent que la sécurité psychologique est une fonction de l’équilibre des pouvoirs et qu’elle est nécessaire à l’apprentissage des personnes et des organisations. Un sentiment de sécurité n’est possible qu’avec l’intégrité culturelle, où les principes de respect, d’équité et d’inclusion sont équilibrés et alignés sur la pratique de l’optimisation de la performance athlétique. 

Dans ce billet de blogue, nous utilisons les Jeux olympiques de 2024 comme étude de cas pour illustrer la façon dont la culture est au cœur du sport, comment la culture peut être changée et renforcée dans le sport canadien, et où le sport canadien se situe sur le plan culturel.  

L’intégrité culturelle est essentielle à la santé et à la performance : le désalignement, tout comme chez un athlète, nuit à l’intégrité du corps et compromet la santé, la concentration, l’expérience et, en fin de compte, la performance. De même, des défauts de conception et des principes directeurs corrompus créent de l’instabilité et nuisent à la santé et aux performances d’une organisation. L’efficacité du leadership, de la gouvernance, de l’administration, de l’entraînement et de la pratique sportive repose sur l’intégrité culturelle, c’est-à-dire sur l’alignement des principes avec la pratique. 

Le cas de l’équipe féminine canadienne de rugby à 7 illustre le coût d’un désalignement culturel. L’équipe a dénoncé des pratiques abusives et discriminatoires et s’est efforcée d’aligner ses pratiques sur les principes d’équité et de respect, sacrifiant au passage un classement parmi les trois premiers. Les entraîneurs et le PDG ont été congédiés et l’organisation a passé une année à effectuer un examen complet afin d’identifier les fractures culturelles et les possibilités d’un meilleur alignement.  

« Une seule équipe » est désormais le mantra d’une organisation qui s’efforce de regagner la confiance et l’engagement de toute la communauté. L’équipe d’entraîneurs a été revitalisée et cette année, aux Jeux de Paris, l’équipe féminine a pu se recentrer, remportant une médaille d’argent olympique 

La culture peut être modifiée et renforcée : Pendant des millénaires, les femmes n’ont pas été autorisées à faire du sport. Par exemple, les femmes ont été historiquement exclues des Jeux olympiques, avec seulement 19 femmes sur 1225 athlètes participant à 5 sports pour la première fois aux Jeux de 1900 à Paris. Ces sports étaient le tennis, la voile, le croquet, l’équitation et le golf. Aux Jeux olympiques de 2024, pour la première fois, les hommes et les femmes ont participé sur un pied d’égalité.  

La culture du sport a été transformée. 

Avant 1900 et selon le baron Pierre de Coubertin, on partait du principe que les femmes n’avaient pas leur place aux Jeux olympiques. Ce postulat était fondé sur les croyances et les valeurs selon lesquelles « une olympiade féminine serait peu pratique, inintéressante, inesthétique et inappropriée » et se manifestait par des artefacts et des pratiques d’exclusion, des obstacles à l’accès et des règles oppressives 

Aujourd’hui, ces croyances ont été réfutées et les valeurs d’équité, d’accès et d’inclusion ont été défendues. Jusqu’à récemment, on entendait souvent dire que « personne ne paierait pour voir des femmes jouer ». Caitlin Clarke, Angel Reese et leurs équipes championnes ont réfuté ce mythe en faisant salle comble lors des matchs du championnat féminin de la NCAA, bientôt repris par la National Women’s Soccer League, la Ligue professionnelle de hockey féminin, la Coupe du monde de rugby féminin et les matchs olympiques.  

Les femmes et leurs alliés ont révélé, remis en question et transformé les principes sexistes et patriarcaux qui sous-tendent le sport, en modifiant les pratiques et les artefacts qui y sont associés. 

À l’instar de nos athlètes olympiques, le sport canadien a connu des hauts et des bas : il est certain que les athlètes canadiens ont été plus rapides, ont sauté plus haut et ont été plus forts, ensemble. Les athlètes canadiens ont également démontré les valeurs olympiques que sont le respect, l’excellence et l’amitié. Tout au long de la période quadriennale, nos athlètes ont fait preuve de leadership, de courage pour relever les défis, de volonté d’accepter les responsabilités, d’humilité dans la victoire et de grâce dans la défaite. Cependant, des fractures culturelles telles que les litiges sur l’égalité salariale au sein de Canada Soccer mettent en évidence les domaines dans lesquels un meilleur alignement entre les principes et la pratique est nécessaire. Ces défis soulignent l’importance de l’intégrité culturelle pour maintenir la confiance et le soutien du public envers le sport canadien. 

Reconnaître les incongruités culturelles est la première étape; aligner activement les pratiques d’encadrement, de gouvernance, ainsi que les pratiques opérationnelles et financières sur les principes d’équité, de respect et de sécurité établirait une base solide pour le succès. 

Le cas d’un entraîneur accrédité par Athlétisme Canada, malgré une suspension antérieure pour relations inappropriées avec des athlètes, en est un exemple. Bien que l‘accréditation ait été révoquée par la suite, cette situation souligne la nécessité d’une gouvernance plus forte et de processus décisionnels conformes aux normes de sécurité et d’éthique. 

Alors que les Jeux olympiques de Paris en 2024 ont franchi une étape importante en matière d’équité entre les genres sur le plan de la participation des athlètes et des services, selon la Dre Andrea Bundon de l’UBC, l’entraînement est resté incongru avec seulement 22 % d’entraîneurs féminins. Aux Jeux de Tokyo en 2021, seuls 16 % des entraîneurs en chef canadiens étaient des femmes.  

L’avenir du sport et des Jeux olympiques dépend de la confiance et de l’investissement du public. Les incongruités culturelles brisent la confiance, l’engagement et le soutien du public. À mesure que le système sportif canadien évolue, le rôle de la culture sera crucial pour préserver l’intégrité du sport et sa valeur sociétale. Remédier aux incongruités culturelles dans les organisations sportives nécessitera de poursuivre les efforts pour aligner les pratiques de leadership, de gouvernance et d’entraînement sur les principes fondamentaux de respect, de sécurité et d’équité. 

En favorisant l’intégrité culturelle, le sport canadien peut renforcer ses fondations et assurer un environnement positif, inclusif et performant pour tous les acteurs du sport : athlètes, dirigeants, personnel et partisans. 

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